Une Cie du 27e BCA place du théâtre (Annecy) le 29 novembre 1942 avant sa dissolution
Les armistices signés en juin 1940 avec l’Allemagne nazie et l’Italie fasciste autorisent la France à conserver une petite armée d’environ 500 000 hommes (dont 100 000 en métropole), appelée communément l’ « Armée d’armistice ». Les Allemands exigent toutefois qu’elle ne soit pas motorisée et ne dispose pas d’armement lourd. Ainsi, cette Armée d’armistice possède seulement les moyens de mener un combat de guérilla en région montagneuse ou boisée.
Le général Huntziger, commandant en chef des forces terrestres de la France de Vichy puis ministre de la Guerre (septembre 1940 - août 1941), fonde huit Divisions militaires (DM) dans la Zone libre. La nouvelle carte reprend peu ou prou les limites et la numérotation des anciennes régions militaires incluses dans la Zone libre. Mais l’implantation des nouvelles garnisons permet judicieusement leur dispersion rapide dans la nature en cas d’invasion ennemie. La dissimulation d’armement aux yeux des contrôleurs de la commission d’armistice est également facilitée.
Chaque DM dispose de trois régiments d’infanterie ou demi-brigades de chasseurs, un régiment d’artillerie, un régiment de cavalerie, un bataillon du génie, un groupe de transmissions et une compagnie de transport. En restructurant les unités, il est décidé de conserver celles qui ont un glorieux passé et un régiment stationné avant-guerre dans chacune des régions militaires françaises. Les unités portant une fourragère (marque de citations collectives) sont maintenues en priorité.
Les deux départements savoyards appartiennent alors à la 14e DM, qui s’étend de la Savoie au Dauphiné. Ils accueillent une partie de la 3e demi-brigade de chasseurs (DBCA), dont le poste de commandement est implanté à Chambéry. Cette DBCA est composée des 6e, 13e et 27e BCA. Pour mémoire, le 6e BCA est implanté à Grenoble. Le 13e BCA, lui, est reconstitué à Chambéry avec des rescapés des 7e et 13e BCA et des éléments de l’Armée des Alpes, notamment le 81e bataillon alpin de forteresse (BAF). Une compagnie est détachée au camp de Saint-Pierre-D’albigny. Sa Section d’éclaireurs-skieurs (SES) stationne au chalet de l’Aurore à la Féclaz. Quant au 27e BCA, il est reconstitué dans sa garnison d’Annecy avec des rescapés de la 25e DBCA, du 67e BCA et des SES restées dans les Alpes. Une section cantonne à Chevrier, sur la ligne de démarcation. Sa SES cantonne sur le massif du Semnoz.
La mise en place de cette Armée d’armistice est l’occasion de rajeunir l’encadrement et de préparer la revanche. Pour souder cette armée nouvelle, les cérémonies, défilés, compétitions et exercices sur le terrain sont accentués. Une nouvelle tenue kaki modèle 1941, proche de celle de 1940, est retenue. Des manœuvres interarmes ont régulièrement lieu sur les grands camps de la zone libre. Le sport ayant vocation à régénérer le pays, chaque DM possède son « Centre de montagne », même pour les unités n’ayant pas une vocation alpine. L’interdiction d’implanter dans les Grandes Alpes des unités autres que les Unités de gardiennage (UG) des fortifications oblige l’état-major à déplacer certaines unités et leurs centres de formation. Ainsi, dans la 14e DM, le Centre de montagne commandé par le capitaine Albouy est implanté Mont-Revard (Savoie).
Après des débuts difficiles, la plupart des unités de l’Armée d’armistice sont opérationnelles durant l'hiver 1941/42. Certaines se dédoublent même clandestinement, comme le 27e BCA annécien, au cas ou le Maréchal Pétain décide de reprendre le combat : les noms des réservistes mobilisables sont listés par un état-major parallèle qui constitue des dépôts d'équipements et d'armements clandestins. Mais cette armée est dissoute sur ordre d'Hitler le 27 novembre 1942 suite au débarquement allié en Afrique du Nord et à l’invasion de la Zone libre par l’occupant allemand. Cette décision est appliquée dès décembre 1942, alors que la Savoie passe sous occupation italienne. Le matériel et les locaux militaires sont saisis par l’occupant. À Annecy, la plupart des dépôts clandestins tombent également aux mains de l’ennemi. Alors que la majorité des unités d’Afrique a basculé dans les FFL, les cadres de Métropole rejoignent souvent la Résistance intérieure. Par exemple, le colonel Jean Valette d’Osia, chef d'état-major du département de la Haute-Savoie, entre en clandestinité pour prendre la tête de l’Armée secrète dans ce département.
Source principale : www.memoire-des-alpins.com
Par Sébastien Chatillon Calonne