Histoire & Mémoire Militaire Alpine

Recherches sur le fait militaire en Savoie (1870 - 1962)

Quand le roi de Hollande en exil Louis Bonaparte se cachait à Rumilly

Portrait de Pierre Magnin
Portrait de Pierre Magnin, ex-sous lieutenant de la Grande armée

Il y a deux siècles de cela, Rumilly accueillait en catimini un étonnant visiteur : Louis Bonaparte (1778-1846), frère cadet de l’empereur Napoléon Ier et éphémère roi de Hollande (1806-1810). Depuis la chute de l’Empire français en 1815, les souverains absolus sont de retour en Europe et la répression s’abat sur les opposants. Louis Bonaparte n’est donc plus qu’un fugitif qui erre et complote, surveillé par toutes les polices d’Europe. Pour l’heure, il tente de rejoindre la Suisse, plus hospitalière, en traversant le royaume de Piémont-Sardaigne. La ville de Rumilly abrite alors de nombreux vétérans entretenant la légende napoléonienne.

C’est donc ici que l’ex-souverain vient chercher de l’aide. Une matinée d’été de 1820, il frappe à la porte de la gentilhommière de M. de Coucy, située au Mollard. Aussi heureux que surpris, cet ancien capitaine de cavalerie de la Garde impériale éloigne les serviteurs pour éviter les indiscrétions, puis va chercher conseil auprès d’un autre bonapartiste, André de Gavend, maire de Rumilly sous l’Empire. Ils déjeunent ensemble et une fois restaurés, mettent au point un plan permettant au fugitif de gagner Genève sans encombre. Dans la soirée, de Coucy rencontre le cafetier de la place de la Mairie Pierre Magnin, un ancien sous-lieutenant de l’infanterie impériale, qui fournit un passeport et un costume au roi déchu.

Ainsi, Louis Bonaparte prend la diligence à l’Hôtel de la Poste en se faisant passer pour Magnin. En effet, ils ont le même âge et se ressemblent étrangement. Le temps de son faux voyage, Magnin se cache quelques jours chez son oncle, curé de Moye, un ancien prêtre réfractaire. Le stratagème fonctionna à merveille. Notons qu’en mai 1860, lors de l’Annexion de la Savoie à la France, le fils du fugitif, une fois devenu l’empereur Napoléon III, rencontra une délégation de Rumilliens. Mais lorsque l’anecdote de la fugue de son père lui est rapportée, l’Empereur ne manifeste curieusement ni émotion particulière ni reconnaissance pour cet acte de résistance. La réputation volage de sa mère lui a sans doute laisser penser que le roi déchu n'était en réalité pas son père biologique...

Par Sébastien Chatillon Calonne

Dauphiné Libéré du 23/03/2020

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